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Camerone 2017, hommage particulier aux volontaires supplétifs indochinois.

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| 11 Mars 2017 | 33232 vues

Le général commandant la Légion étrangère Jean Maurin avait rendu officiel, en janvier, le thème de l’année 2017 pour toute la Légion : « légionnaire, tu es un volontaire ». Dans la continuité de ce message,il a souhaité souligner le rôle déterminant des volontaires indochinois qui ont combattu comme supplétifs dans les rangs de la Légion. Ces «frères d’armes » seront représentés par le sergent-chef (er) N’Guyen Van Phong, futur porteur de la main du capitaine Danjou, à l’occasion de la commémoration du combat de Camerone, à Aubagne le 30 avril 2017.

Publié le 10/03/2017 à 17:49 - modifié le 29/03/2017 | DRP

Le général commandant la Légion étrangère Jean Maurin avait rendu officiel, en janvier, le thème de l’année 2017 pour toute la Légion : « légionnaire, tu es un volontaire ». Répété à chaque occasion, il permet à la communauté Légion de se retrouver durant toute l’année autour d’un message fort et fédérateur qui s’impose à chaque régiment. Cette année, le message est le premier article du code d’honneur de la Légion étrangère, instauré dans les années 80 : « Légionnaire, tu es un volontaire servant la France avec honneur et fidélité ». Et dans cet article, le mot « volontaire » sera mis en avant. Il rappelle symboliquement le premier pas, le premier acte de volontariat, qui a amené chaque légionnaire, chaque sous-officier, mais aussi chaque officier à venir servir la Légion étrangère.

Bérêt blanc des CIPLE | Collection du musée de la Légion étrangère

Dans la continuité de ce message, le général a souhaité souligner le rôle déterminant des volontaires indochinois qui ont combattu comme supplétifs dans les rangs de la Légion. L’Histoire retient cet épisode comme celui du « jaunissement » (1950 – 1954).

A toutes les époques, l’armée française eut recours à des soldats indigènes dans ses territoires coloniaux. Mais, jusqu’à la guerre d’Indochine, la Légion y échappa. L’introduction de réguliers indochinois dans la quasi-totalité des formations légionnaires fut décidée pour remplacer les pertes subies sur la RC 4 ; le général de Lattre de Tassigny accéléra le processus. Si la Légion fut attentive à ne jamais dépasser un volume trop important, au risque de trop ressembler à la Coloniale, chaque bataillon était prévu en compter jusqu’à 400, pour arriver à 1 200 hommes. Plusieurs méthodes furent employées : l’amalgame avec les compagnies indochinoises parachutistes de la Légion étrangère (CIPLE) dans les BEP, la substitution dans les unités spécialisées, ou la mise sur pied de bataillons mixtes dès leur constitution. Les supplétifs apportèrent leurs techniques de guérilla, leur connaissance du terrain, leurs méthodes non conventionnelles. La Légion, ainsi qu’elle avait appris des espagnols, des russes, des allemands, gagna un élément précieux avec les supplétifs indochinois : la souplesse. Faut-il rappeler cet épisode, lorsqu’un légionnaire hongrois ordonne un « mau-len, mau-len » répercuté par un supplétif indochinois qui crie « schnell, schnell ». L’amalgame a fonctionné entre frères d’armes. Plus de 2 000 d’entre eux ont été tués au combat. Une plaque à leur mémoire sera dévoilée au musée après la prise d’armes de Camerone, le 30 avril 2017.

le sergent-chef (er) N’Guyen Van Phong reçu par le général Maurin le 13 mars 2017

Parmi ces «frères d’armes », le général Jean Maurin vient de désigner le sergent-chef (er) N’Guyen Van Phong pour les représenter. Il sera le futur porteur de la main du capitaine Danjou à l’occasion de la commémoration du combat de Camerone, à Aubagne le 30 avril 2017.

Né le 21 décembre  1935 au Nord Vietnam à Noi Bai, il s’engage à dix-huit ans pour servir comme supplétif au 32e bataillon de marche de tirailleurs sénégalais  (32 BMTS) du Corps expéditionnaire français. D’abord à la 329e, puis à la 331e compagnie de supplétifs militaires, il servira ensuite au commando 14 en 1953. Il obtient trois  citations durant cette année. Un an plus tard, en mai 1954, il contracte un engagement au titre de la base aéroportée Nord (BAPN) et est affecté au 1er bataillon étranger de parachutiste (1BEP) d’abord comme supplétif, il porte le béret blanc. Le 19 septembre 1955, il est admis comme «légionnaire » par l’intendant militaire de Saïgon.  Il sera ensuite affecté au 2 BEP en 1955. Il est peu après rapatrié en Afrique du Nord. Le légionnaire Nguyen quitte sa terre natale, avec trois citations sur sa croix de guerre des TOE et un brevet de parachutiste, mais ne quitte pas pour autant la guerre. Lorsqu’il arrive en Algérie, les opérations militaires ont débuté depuis plus d’un an.

Grenadier-voltigeur « dynamique et courageux, volontaire pour toutes les sorties de jour et de nuit », il fait montre « des plus brillantes qualités de combattant ». En dix-huit mois, il est à nouveau cité à trois reprises et s’affirme comme un soldat éprouvé qui, après la perte de son chef prend le commandement de son équipe. En 1957, il s’illustre pour avoir « magnifiquement » donné l’assaut à des rebelles algériens. Cité une nouvelle fois mais cette fois–ci à l’ordre de l’armée, il se voit attribuer la médaille militaire « car par son action déterminée, il a été l’un des plus efficaces artisans d’un succès coûtant à l’adversaire soixante morts, six mitrailleurs, vingt pistolets mitrailleurs et trente fusils ». Caporal en 1958, caporal-chef l’année suivante, il est affecté à la 3ème compagnie saharienne portée de la légion étrangère (CSPL) en octobre 1960. Deux ans plus tard, il est promu sergent et, en 1963, la 3ème CSPLE qui est dissoute devient la 7ème compagnie portée du 4°REI. Le sergent Nguyen quitte définitivement l’Algérie en 1964 et rejoint ensuite la 13ème DBLE qui vient de s’installer à Djibouti. A son retour en 1967 il est affecté au 2ème REP et effectue le déménagement du régiment entre Bou-Sfer et Calvi. Il y est considéré comme une excellent chef de section. Il est naturalisé français en 1968 et se marie en 1970. Jeune sergent-chef affecté à la 2ème compagnie, il prend le commandement d’une section avec laquelle il sera projeté au Tchad où il reste une année (avril 1969-avril 1970). Le 19 juin 1971, le sergent-chef Nguyen est rendu à la vie civile après dix-huit ans de services loyaux.

N’Guyen Van Phong était, lors de la cérémonie de Camerone de 2010, accompagnateur du Chef de bataillon (er) Roger Faulques, porteur de la main. Officier de la Légion d’honneur (2003), médaillé militaire (1958), sept fois cité dont trois fois comme supplétif indochinois il est membre de l’association des commandos Nord Vietnam dont il sera longtemps le porte-fanion.

Les accompagnateurs seront au nombre de 11, à hauteur de un légionnaire par régiment. Ce choix met en valeur la continuité entre les anciens et les jeunes, par le biais de cet acte de volontariat qui les engage et les attache définitivement à la Légion étrangère.

 

 

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