LE

La fête de la Nativité, ce temps privilégié de la fraternité légionnaire.

Retour
| 27 Décembre 2016 | 22116 vues

les Noëls à la Légion étrangère bercent les souvenirs, chantent les espérances et célèbrent la fraternité.

Il y a deux ans, dans l’éditorial de Noël, je rappelais trois messages : prendre conscience de la richesse de l’héritage du Noël légionnaire construit depuis 150 ans par nos anciens, et légué pour que les légionnaires trouvent autour de la crèche la chaleur de leur nouvelle famille qui tente de faire oublier le poids d’une solitude ou le vide de certaines absences ; former des voeux d’espérance ; vivre la fraternité légionnaire en prenant le temps de casser la routine et de bien faire, chacun à son niveau, simplement, les tâches traditionnelles qui entourent le rite du Noël légionnaire.

L’année dernière, je mettais en parallèle le rite solennel de Camerone qui dicte au légionnaire les lois intangibles du caractère sacré de la mission et de la fi délité à la parole donnée, au rite plus humble de Noël qui fait revivre l’espérance chez le légionnaire, dans la chaleur de sa nouvelle famille, et le conforte dans son devoir de solidarité envers ses pairs. J’insistais sur l’importance des crèches, en citant, entre autres, ces magnifi ques mots du général Goupil, qui, cette année encore, doivent être relus et médités : “une crèche légionnaire : à ceux qui sont venus dans le doute, elle répond confiance ; à ceux que l’inquiétude ronge, elle apporte sérénité ; à ceux que l’isolement écrase, elle assure fraternité”.

Je terminais par le témoignage poignant du général Gaultier qui voyait en Noël “la fête numéro un de la Légion” et que je vous conseille également de relire (KB 783). Cette année, conformément à la tradition établie depuis la création du journal Képi blanc en 1947, je viens d’abord vous souhaiter à tous un très joyeux Noël Légionnaire. Au-delà de ces mots, il n’y a en fait qu’un seul souhait de fraternité et de paix que je formule aussi bien pour nos anciens, que pour la Légion d’active : “Courage, Noël donne un sens à notre vie de légionnaire”.

Ces mots sont du Père Hirlemann, Compagnon de la Libération, aumônier de la 13e DBLE pendant la Seconde guerre mondiale, puis aumônier de la Légion, et qui repose dans le carré Légion du cimetière de Puyloubier inauguré par le général Koenig en 1955. Né dans une famille modeste où les enfants sont le seul trésor, fi ls d’un postier alsacien et d’une mère lorraine ayant tous deux dû fuir l’annexion allemande de 1871, il avait fait sienne la devise du curé d’Ars “on n’a rien fait tant qu’on n’a pas tout donné”, devise inscrite aujourd’hui dans la petite église provençale de Puyloubier que servit le Père Hirlemann jusqu’à sa mort.

Missionnaire, puis baroudeur, puis sage parmi nos anciens et invalides, il était profondément attaché aux légionnaires qui voyaient en lui celui qui “savait ouvrir les coeurs”. Lors des cérémonies marquant le 25e anniversaire de Bir Hakeim, il marqua à nouveau son attachement à la Légion devant un parterre de Compagnons, dont le général Koenig, en ces termes : “Elle ne peut laisser indifférents ceux qui l’approchent. Si elle a des misères, elle a aussi et surtout ses grandeurs que traduisent les deux mots : Honneur et Fidélité.

Elle porte avec elle comme un joyau sans prix, que nul ne songe à lui ravir, la plus noble des marques, celle du sacrifice. Permettez au vieil aumônier qui lui a donné son coeur, et qui ne l’a pas repris, de retrouver avec vous, en priant pour ses morts, l’âme de la Légion étrangère. Elle se défi nit ainsi : sens de la fraternité humaine, espoir d’un dépassement de soi, grâce enfin de mourir dignement. Sans fraternité humaine, il n’y a pas de Légion étrangère. Fraternité humaine, c’est-àdire acceptation en commun de l’effort de lutte, de la souffrance, du sacrifi ce ; voilà qui donne à une vie sa vraie valeur.

Nous gardons, certes, nos défauts, nos passions, mais n’est-ce pas une sorte de miracle humain (…) que de faire de 20 nationalités – et plus – si diverses de sang, de formation, de langue, de religion, un légionnaire avec un même esprit, un même coeur, une même volonté : servir. Elle ne nous a pas trompés notre devise : Legio Patria Nostra, une Patrie où nous sommes tous frères”. Quelle belle défi nition de la fraternité légionnaire donnée par cet ancien “qui a tant fait parce qu’il a tout donné !” Afférente à la fraternité humaine, il y a la paix intérieure.

Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté” disent les Ecritures pour Noël. Dans le KB de Noël 1947, on peut lire sur cette exclamation ce très beau témoignage du rédacteur en chef : “ce mot d’ordre, ce salut, cette expression d’un voeu n’est pas souvent prononcé en notre Légion mais il est des plus présents et des plus vivants dans nos esprits et dans nos coeurs. Ils le savent bien ceux que la vie a durement secoués ou tragiquement broyés mais qui sont restés de bonne volonté, qu’ils trouvent et trouveront toujours la Paix à la Légion. Ils savent très bien aussi que cette Paix, qui n’est pas une tranquillité, s’achète au prix fort et ce qu’elle représente de fatigue, de travaux, d’obéissance et souvent aussi de sang versé. Ils savent qu’en apparence, c’est une drôle de paix, mais qu’en profondeur et en soi-même, elle est belle et douce et consolante.

Et dans les Noëls de Légion, plus que les souvenirs qu’ils bercent et plus que les espérances qu’ils chantent, c’est leur bonne volonté qu’ils célèbrent et leur Paix retrouvée qu’ils fêtent”.

Joyeux Noël, dans la fraternité légionnaire et dans la Paix, à vous tous, légionnaires “de bonne volonté” !

 

Par le Général de division Jean Maurin, commandant la Légion étrangère (Képi blanc magazine N° 794)